AFP – Emmanuel Macron a reconnu mardi, « au nom de la France », que l’avocat et leader nationaliste Ali Boumendjel avait été « torturé et assassiné » par l’armée française pendant la guerre d’Algérie en 1957, un geste d’apaisement recommandé par le rapport de l’historien Benjamin Stora.
Ce geste « n’est pas un acte isolé », promet le président français dans ce communiqué. « Aucun crime, aucune atrocité commise par quiconque pendant la guerre d’Algérie ne peut être excusée ou dissimulée ».
Premier président français né après la guerre d’Algérie (1954-1962), M. Macron s’est engagé à prendre des «actes symboliques» pour tenter de réconcilier les deux pays, mais il a exclu toute «repentance» et «excuses».
Le président français a lui-même annoncé cette reconnaissance aux petits-enfants d’Ali Boumendjel en les recevant mardi. À l’époque, l’assassinat de l’avocat avait été déguisé en suicide.
« Au cœur de la bataille d’Alger, il a été arrêté par l’armée française, placé à l’isolement, torturé, puis assassiné le 23 mars 1957 », détaille l’Elysée dans un communiqué. En 2000, « Paul Aussaresses (ancien chef du renseignement à Alger, ndlr) lui-même a avoué avoir ordonné à l’un de ses subordonnés de le tuer et de déguiser le crime en suicide ».
«Aujourd’hui, le président de la République a reçu à l’Elysée quatre des petits-enfants d’Ali Boumendjel pour leur dire, au nom de la France, ce que Malika Boumendjel aurait aimé entendre: Ali Boumendjel ne s’est pas suicidé. Il a été torturé puis assassiné », ajoute la présidence française.
«Il leur a également fait part de sa volonté de poursuivre le travail entamé il y a plusieurs années pour recueillir des témoignages, encourager le travail des historiens en ouvrant les archives, afin de donner à toutes les familles de disparus, des deux côtés de la Méditerranée, le moyen de connaître la vérité ».
L’Elysée ajoute que « ce travail sera prolongé et approfondi au cours des prochains mois, afin que nous puissions avancer vers l’apaisement et la réconciliation », voulant « regarder l’histoire en face, reconnaître la vérité des faits ».
«La génération des petits-enfants d’Ali Boumendjel doit pouvoir construire son destin, loin des deux ornières de l’amnésie et du ressentiment. C’est pour eux maintenant, pour la jeunesse française et algérienne, qu’il faut avancer sur le chemin de la vérité, le seul qui puisse conduire à la réconciliation des souvenirs », ajoute l’Élysée.
Le mois dernier, la nièce d’Ali Boumendjel, Fadela Boumendjel-Chitour, a dénoncé un « mensonge de l’Etat (français) qui a été dévastateur ».
« Nous ne favoriserons pas les bonnes relations au détriment de l’histoire »
La reconnaissance de ce crime par la France fait partie des recommandations du rapport Stora sur la colonisation et la guerre d’Algérie, afin de résoudre les tensions autour de la mémoire de ce conflit.
Ce document, rendu le 20 janvier, a suscité de vives critiques, tant en France qu’en Algérie, notamment pour ne pas avoir prôné des «excuses» de Paris pour la colonisation.
La puissante Organisation des Moudjahedin (ONM), les vétérans de la guerre d’indépendance (1954-1962) accusait Benjamin Stora d’avoir « dissimulé les crimes coloniaux » de la France en Algérie.
Le comité national de liaison des harkis (CNLH), anciens combattants auxiliaires de l’armée française pendant le conflit, a dénoncé un rapport «minimaliste» et a exigé que la France reconnaisse «l’abandon et le massacre des harkis, après les accords d’Evian et les cessez-le-feu du 19 mars 1962 ».
Le gouvernement algérien a appelé à plusieurs reprises à la «reconnaissance des crimes coloniaux» de la part de la France.
« Nous ne favoriserons pas les bonnes relations au détriment de l’histoire et de la mémoire, mais les problèmes sont résolus avec intelligence et calme, et non avec des slogans », a déclaré lundi soir le président algérien Abdelmadjid Tebboune.
La réconciliation entre Paris et Alger doit s’inscrire dans une reconnaissance mutuelle qui n’est «ni déni ni repentir», a déclaré pour sa part mardi matin l’ambassadeur de France en Algérie, François Gouyette, dans un entretien au quotidien francophone L’Expression, proche du pouvoir.
A l’approche du 60ème anniversaire de la fin de la guerre et de l’indépendance de l’Algérie en 2022, Paris et Alger ont fait de cette «réconciliation des mémoires» un enjeu prioritaire et MM. Macron et Tebboune se sont engagés à travailler ensemble sur ce dossier.
L’après guerre d’Algérie: Macron reconnaît la torture et l’assassinat du militant Ali Boumendjel par l’armée française est apparu en premier sur Actuexpress.
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